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Rencontre des élèves du lycée Pierre Bayen avec Martin Page

L’HISTOIRE DE LA RENCONTRE

Il était neuf heures et demie en ce jeudi deux avril 2015, quand la classe de 2de7 du Lycée Bayen partit à la rencontre de Martin Page. Impatients et curieux, les élèves arrivèrent à la bibliothèque Georges Pompidou, accompagnés de leurs professeurs-documentalistes et de Mme Lemaire, leur professeur de Littérature. En entrant dans l’auditorium, réservé pour l’occasion, les lycéens furent impressionnés par les lieux : une salle très vaste, aux sièges rouges, avec un éclairage de circonstance : une lumière centrée sur une petite scène où quatre fauteuils avaient été installés pour les journalistes de la classe et l’auteur de L’Apiculture selon Samuel Beckett. Les élèves semblaient un peu stressés, mais surtout impatients de mettre un visage sur le nom de cet auteur.

Martin Page entra dans l’auditorium, descendit les escaliers longeant les sièges du public et monta sur scènea; il paraissait, lui aussi, assez intimidé. Dès son arrivée sur l’estrade, comme il était vêtu fort chaudement, il posa en vrac ses deux ou trois gilets et son écharpe sur un fauteuil. Sa tenue était assez simple, constituée pour l’essentiel d’une chemise à carreaux rouges, blancs et noirs et d’un jean plutôt large. Cela leur fit penser au personnage principal de son livre, Samuel Beckett – celui de L’Apiculture selon Samuel Beckett qui s’habillait d’une manière un peu farfelue. Martin Page portait des lunettes, son visage était souriant et il avait l’air plutôt sympathique. Cette première impression qui se dégageait du personnage rendit les élèves confiants.

Afin de commencer, l’un des professeurs encouragea les journalistes en herbe à rejoindre l’auteur sur scène. Le dialogue se mit bientôt en place et les questions s’enchaînèrent entre l’écrivain et les trois élèves chargées de mener l’interview. L’une d’entre elles, Léna, impressionnée se lança et déclara d’une voix tremblante : «Bonjour, mes amies et moi-même, allons vous poser quelques questions à propos de votre oeuvre et de vous-même… Premièrement, pourquoi avoir donné un tel titre à votre livre, L’Apiculture selon Samuel Beckett ?». Martin Page répondit calmement, d’une voix assurée : « Un titre est difficile à trouver. Il est choisi en fonction de l’histoire – donc en dernier. Pour un titre, je cherche généralement quelque chose d’inédit, de chaleureux et d’absurde afin qu’il puisse donner l’envie de lire. J’ai donc choisi ce titre car le livre parle de miel, d’abeille et de gourmandise ! Je trouvais cela intéressant […]».

Après une réponse assez longue et détaillée, une seconde adolescente, plus confiante, Esperancia, lui posa la question suivante : « Pourquoi avoir choisi de parler de Beckett dans votre livre ?». De nouveau, avec une aisance orale impressionnante, on entendit l’auteur expliquer ce qui l’avait conduit à choisir la figure de Beckett plutôt que celle d’un autre auteur : « Pour moi, Beckett est le Saint Patron des écrivains, c’est un auteur
que j’apprécie beaucoup et je voulais le faire à mon image […] en fonction de ce que je pense de lui. C’était une façon de se l’approprier. C’est une sorte de kidnapping littéraire que je me suis permis de faire, car Beckett est décédé. J’ai aussi choisi Beckett par rapport à l’évasion de cinq détenus en Suède dans la prison de Kumla lors de la représentation de la pièce écrite par lui-même, En attendant Godot, qui d’ailleurs se déroule aussi dans le livre. Cette scène m’a touché, j’ai donc choisi de l’intégrer dans mon roman».

Les questions commencèrent à se succéder et l’on sentait de plus en plus l’aisance des jeunes damoiselles. Myriam, par exemple, lui demanda ainsi : «Quels sont les liens entre le Beckett réel et le Beckett fictif ?». Martin Page demeura un instant pensif avant de s’exclamer en souriant : « Qui peut savoir réellement ? Le Beckett de mon livre est mon Beckett. Il est comme je le vois, et non comme il a sûrement été. Mais peut-être qu’il portait vraiment des vêtements hippies et qu’il avait des ruches sur son toit, qui sait ? »

Léna, plus à l’aise qu’au début, lui demanda : «Pensez-vous, comme Beckett, que tous les Hommes sont prisonniers ? ». Et, une nouvelle fois, très posément, Martin Page expliqua un point qui avait échappé à certains : « Ce n’est pas ce que Beckett pense. ‘JE’ parle à travers lui ; c’est donc moi qui parle et non Beckett ! Je me le suis simplement approprié. Pour moi, le libre arbitre est un but ; il peut se gagner mais ce n’est qu’un état naturel. Donc oui, je pense que les Hommes sont prisonniers.» Vint le tour d’Esperancia : «Pourquoi avoir choisi la forme de journal pour votre livre ? ». L’auteur lui expliqua sa démarche d’écrivain : « Écrire c’est faire des choix. J’ai juste suivi mon intuition et la forme du journal m’est venue.» Les questions émanant tant du public que des interviewers se succédèrent avant que Myriam ne conclue : « Merci pour ces réponses, cela a été un plaisir de vous rencontrer». Martin Page avait répondu explicitement aux différentes questions posées tout en dérivant vers d’autres sujets, toujours avec une note d’humour, ce qui avait mis à l’aise les filles présentes sur scène.

A travers ces échanges, les élèves réussirent à mieux cerner le personnage et sa personnalité. Ils découvrirent un homme simple, attaché à son entourage et à ses passions – comme la musique, la guitare et la gastronomie. Mais aussi un côté rebelle, ne supportant pas l’autorité. Martin Page, détendu, et surtout plus à l’aise debout devant un public qu’enfoncé au fond d’un fauteuil, s’était levé au cours de la rencontre pour faire participer le public et se sentir plus proche de lui. L’interview touchant à sa fin, on avait vu les journalistes en herbe plutôt ravies de leur prestation sur scène, tout le monde était heureux de cette rencontre, mais chagriné de devoir quitter la salle : Martin Page s’était montré accessible, chaleureux et passionnant ; mettre un terme à ce moment privilégié était difficile. Il s’acheva donc, naturellement, par une séance de dédicaces : chacun repartirait avec un autographe de l’auteur. Quant aux élèves, ils lui remirent un petit livret qu’ils avaient préparé afin qu’il garde un souvenir chaleureux de cette rencontre avec la classe de 2de7 du Lycée Bayen.

couverture

Les élèves de 2de 7
Lycée Pierre Bayen
Châlons-en-Champagne

 

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